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Un capharnaüm dans ma tête
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18 juillet 2009

Gardienne : chapitre 1

Chapitre 1 : Comment suis-je devenue Vampire.


13 Septembre 2004, dix-neuf heures trente… J’étais en retard. Je voulais être irréprochable pour ce rendez-vous et cela m’avait mise en retard. Je venais de sortir de ma douche et je ne savais absolument pas comment je devais m’habiller. Je contemplai ma penderie depuis un long moment et je ne réussissais toujours pas à me décider. Ma mère fit soudain irruption derrière moi.

« Je ne comprends pas pourquoi tu te mets autant en frais pour lui. Ce n’est plus ton petit ami.

- Il m’a donné ce rendez-vous et je vais y aller maman. Cela fait un an aujourd’hui que je l’ai plaqué et que nous ne nous sommes pas adressé la parole.

- Tu ne crois pas qu’il…

- Ne t’inquiète pas ! » L’interrompis-je tout en pensant la même chose qu’elle. Pourquoi m’inviter autrement ?

J’avais finalement choisie ma tenue : un pantalon noir et une tunique chinoise de la même couleur  brodée de dragons dorés. Chic mais discret ! Impeccable pour un anniversaire de rupture, pensai-je avec amertume. Il y a encore un an cela aurait été pour lui plaire que je me serais habillée ainsi. Allez… avoue… si tu as mis ta plus belle tenue c’est bien pour lui.

Mon Dieu, pourquoi fallait-il que je retombe dans ce piège ? En effet, cela faisait déjà un an que je lui avais dit que tout était fini entre nous, les yeux remplis de larme parce que j’étais toujours amoureuse de lui mais je ne pouvais plus supporter ce que son frère pensait de moi et je n’avais pas le droit de lui demander de faire un choix entre lui et moi.

Je m’engouffrai dans ma chambre pour aller m’habiller. J’étais déjà plus qu’en retard. Je n’avais donc nul besoin de m’attarder encore plus par la faute de ce genre de pensée.

« Avoue tout de même que ce rendez-vous est étrange, me dit ma mère.

- Ce n’est qu’une pizza entre ami. Il ne va pas me faire de mal. »

Je n’avais pas tout à fait tort. Le danger ne vint pas de lui. Il fut totalement étranger à ce qui se passa.

« Tu es sûre que tu ne veux pas que je vienne te chercher quand ce sera fini. »

Je sortis de ma chambre et lui fit signe que non. Elle n’avait pas besoin de venir me chercher. Notre ville était bien trop petite pour que je me fasse agresser. De plus, j’avais besoin de réfléchir avant et après l’avoir vu. Voilà pourquoi, je voulais aller là-bas à pied et reviendrais de même.

« Sois prudente.

- Je te le promets. »

Je l’embrassai affectueusement sur la joue. Je mis mes bottes puis enfilai mon manteau en cuir et après lui avoir promis une nouvelle fois que je serais prudente, je partis de la maison.

Il ne faisait pas encore tout à fait nuit lorsque j’arrivai en vue de la pizzeria où j’avais rendez-vous avec mon ex-petit ami. J’étais anxieuse à l’idée de cette rencontre. Mon cœur battait si vite à l’idée de le revoir. Il fallait bien se rendre à l’évidence. Au plus profond de moi, j’avais encore de profonds sentiments pour lui mais j’avais également peur de cette rencontre. Qu’allions-nous bien pouvoir nous raconter après tout ce temps ? En y réfléchissant bien, j’aurais sans doute préféré le retrouver en compagnie de quelques amis communs, sa demi-sœur par exemple, mais il avait voulu un tête-à-tête et j’avais accepté. Je me traitai mentalement d’idiote pour l’avoir fait.

Il y eut soudain un drôle de bruit. Je me retournai. Rien. Je pressai un peu le pas. Le bruit se répéta. Il s’agissait d’un bruit de pas léger et glissant. Quelqu’un marchait derrière moi et semblait vouloir me le faire savoir. Je ralentis le pas. Cette personne fit de même. Je me mis de nouveau à accélérer. Même jeu. Il me suit ! Je marchai encore plus vite. Une peur inexplicable s’était soudain emparée de moi. Pendant un moment, je me mis à regretter le refus que j’avais fait à ma mère. Celui ou celle qui était derrière moi accéléra de même comme je m’y attendais.

La pizzeria n’était plus qu’à quelques mètres. Je courrais presque en arrivant. J’y entrai aussi vite que possible, loupai la marche et m’étalai de tout mon long devant… Mon ex.

« Tu vas bien ? » Me demanda-t-il en m’aidant à me relever.

Je me mis à épousseter rageusement ma tunique tout en pestant intérieurement contre la panique stupide qui s’était emparée de moi quelques minutes plus tôt. Je jetai un léger coup d’œil dehors à travers la porte vitrée. Personne. J’étais nerveuse à cause de ce fichu rendez-vous. J’avais dû imaginer ce qui venait de m’arriver.

« Un problème ? Me questionna-t-il.

- Aucun, marmonnai-je de mauvaise humeur. Comment vas-tu ? » ajoutai-je plus aimablement afin de détourner la conversation.

En même temps, je ne pouvais m’empêcher de penser qu’encore une fois, ma maladresse avait tout fichu en l’air. Dès que tout se passait bien pour moi, il y avait toujours une tuile qui me tombait dessus ou je paraissais ridicule … Et devant lui en plus ! C’était bien ça le pire ! Dire que je voulais lui montrer que tout allait bien pour moi, que tout se passait très bien sans lui.

Nous nous installâmes quelques minutes plus tard à une table pour deux. On nous donna aussitôt les menus. Je me plongeais aussitôt dans l’étude de celui-ci pour échapper au regard curieux de mon ex-petit ami alors que je savais pertinemment ce que j’allais commander.

« Une pizza Norvégienne, c’est bien cela, me dit-il.

- Tu n’as pas oublié ! Répliquai-je incrédule en levant les yeux vers lui.

- Pourquoi aurais-je oublié ?

- Tu m’as plutôt vite remplacée quand je t’ai dit que tout était fini entre nous. »

J’y étais peut-être allée un peu fort sur ce coup-là mais après tout, c’était lui qui était sorti avec une fille moins de quinze jours après notre rupture… Il baissa la tête, un peu gêné.

« Parlons d’autre choses, lui dis-je, soudain prise de remords. Que deviens-tu ? »

J’avais réussi à réchauffer l’atmosphère. Nous avions enfin brisé la glace. Il n’y eut plus aucun silence embarrassé et gêné jusqu’à la fin du repas. Nous arrivions de nouveau à rire comme de vieux amis, comme si nous n’avions jamais été… Cela me faisait du bien mais… J’avais tout de même l’impression de jouer un rôle à certains moments ce qui me laissait perplexe.

J’aurais aimé que cette soirée n’aie pas de fin. Après tout, cela aurait peut être mieux valu. Mais toutes les bonnes choses en ont une. Ce fut le cas pour cette soirée. Le temps passe quoi qu’il arrive mais je n’ai plus vraiment besoin de m’inquiéter de cela maintenant. Après avoir payé nos repas, je l’accompagnai dehors jusqu’à sa mobylette.

« Tu l’as toujours ! Je croyais que tu voulais à tout prix t’en débarrasser, dis-je d’un ton moqueur.

-Mais bientôt j’aurais le permis alors… Bon débarras ! »

Un silence nous sépara.

« Au revoir alors. On devrait se refaire une soirée comme celle là un de ces jours. »

Il avait prononcé la phrase que me faisait le plus peur. Le revoir me faisait toujours autant souffrir voilà ce dont je m’étais rendue compte lors de cette soirée. Bien sûr, il ne l’avait pas remarqué. Il avait toujours manqué de flair en ce qui me concernait après tout. Le revoir, c’était revivre tout ce qui s’était passé… C’était revoir son frère. Maintenant que je suis ce que je suis, je devrais peut-être aller le voir celui-là…

«Je ne crois pas que ce soit une bonne idée, lui répondis-je après quelques instants de réflexion. J’ai été heureuse d’avoir passé cette soirée avec toi, de te reparler enfin… Sincèrement. Mais cela m’a permis de comprendre que tout était bel et bien fini. Je suis désolée. Je crois qu’il vaut mieux ne plus nous revoir.»

Il ne répondit pas. Je ne sais pas ce qu’il attendait de cette soirée mais à sa tête, ce ne devait pas être mes dernières paroles. J’étais désolée et c’était vrai. Désolée que tout se soit fini ainsi, que cela n’ait pas marché entre nous. Il faisait partie de mon passé et je devais aller de l’avant.

Je lui dis au revoir. Il éloigna dans une pétarade à réveiller les morts. Tout était bel et bien fini.

Je restai seule sur le trottoir dans la nuit, les yeux secs mais le cœur lourd. Il devait être à peu près onze heures. Je devais rentrer au plus vite. Mais j’avais besoin d’être seule, de réfléchir à tout cela. Je me mis donc lentement en marche.

Tout était si calme. J’aime la nuit et je l’ai toujours aimée. Tout y est si mystérieux ! Tout peut y arriver. Devenir Vampire a fait de la nuit la plus secrète et la plus sûre des amies. Je me sens maintenant encore plus en phase avec elle.

J’étais totalement perdue dans mes pensées. La soirée avait été plutôt agréable mais c’était terminée sur une note froide. J’étais sortie de la ville. Il n’y avait plus aucun lampadaire. Seule la lumière de quelques rares maisons me permettaient de voir ce qu’il se passait. C’était l’endroit le plus dangereux du chemin que je devais emprunter pour rentrer chez moi. Je pressai légèrement le pas tout en boutonnant mon manteau. Soudain, cela recommença ! On me suivait de nouveau ! Je pressai encore un peu plus le pas. J’arrivai enfin à une zone un peu plus éclairée. C’est là qu’ils surgirent devant moi. Une dizaine de spectres pâles totalement vêtus de noir. Je me retournai. Ils m’avaient encerclées ! Je ne pouvais pas leur échapper. L’un d’eux s’approcha de moi. Homme ou femme, je n’en ai aucune idée. Je ne vis pas son visage. Je ne voyais aucun de leurs visages. On me murmura à l’oreille.

« Pardonne-nous ce geste Maîtresse. »

On me donna un coup puissant sur la nuque avant que je ne puisse esquisser le moindre geste de fuite. Je m’évanouis.


J’ignore combien de temps il s’écoula entre mon agression et mon réveil. Lorsque je rouvris les yeux, je me trouvais dans un endroit sombre et inquiétant. Je tentai de me lever mais j’étais attachée à une table de pierre. Les cordes me sciaient la peau. Elles me faisaient souffrir à chaque tentative que je faisais pour me libérer. Soudain la pièce s’éclaira. Je ne peux pas dire où j’étais. Cela tenait du temple et du lieu de culte mais aussi d’autre chose… Comme une salle de spectacle et c’est-ce qui allait se produire maintenant : un spectacle.

J’avisai des sièges sur le côté. Assis dessus, une vingtaine de mes fantômes. Ils portaient tous des loups noirs. D’eux, je ne voyais que leurs lèvres très rouges qui se détachaient de leurs visages si blancs. L’autre côté de la pièce était identique. Ils me regardaient attentivement. Leurs yeux étaient encore plus lumineux que les rares torches qui servaient à éclairer la pièce. Tout était trop brillant ici. Peut être m’avaient-ils drogués ?

Un coup de gong éclata alors dans la salle et me fit sursauter. Les spectres assis tournèrent la tête sur le côté. Je soulevai légèrement la mienne. En face de moi, une étrange procession se déroulait. Une quinzaine de fantômes entièrement vêtus de noir en file indienne étaient en train de s’approcher de moi. Ils s’arrêtèrent devant la table où j’étais attachée. L’un d’eux, une femme autant que je puisse en juger, se détacha du groupe. Elle avait un foulard noir opaque à la main. Elle se rapprocha de la table puis soudain sauta dessus sans le moindre effort. Comme tous les autres, elle portait ce loup noir qui me cachait la majeure partie de leurs visages. Je tentai de parler mais aucun son ne sortit de ma bouche. Elle s’allongea à côté de moi puis posa son doigt sur mes lèvres. Elle me caressa ensuite doucement le visage.

« Du calme, murmura-t-elle. Cela ne te fera aucun mal Maîtresse. Pas le moindre mal. Ne t’inquiète pas. Tout cela sera très vite fini. »

Elle me banda alors soigneusement les yeux et elle commença doucement, presque tendrement à me déshabiller tout en caressant lentement chaque recoin de mon corps. Elle était plus qu’experte dans ces gestes et elle finit par réussir à m’arracher un petit gémissement de plaisir. Ceci fait, elle m’embrassa langoureusement.

« N’ai pas peur. Ne résiste pas. Laisse-toi aller. » Répétait-elle inlassablement.

Sa bouche dériva de mes lèvres à ma joue puis elle descendit plus bas, beaucoup plus bas. Je poussais un soupir de contentement. Ses lèvres remontèrent alors jusqu’à mon cou, juste à l’endroit où…

« Ce n’est qu’un mauvais moment à passer. Après tout ira bien. Tu auras l’éternité devant toi.» chuchota-t-elle, la bouche tout contre mon cou.

J’avais perdu pied depuis longtemps et toutes ses paroles ne m’atteignaient guère. Je pensais encore aux délices que je venais d’éprouver. Ses dents se plantèrent alors dans ma peau !

J’essayai de crier mais elle m’embrassa de nouveau sur la bouche pour me faire taire. Je sentis alors le goût de mon propre sang sur mes lèvres, dans ma gorge. Elle approfondit son baiser et… Je le lui rendis.

D’autres lèvres se pressaient maintenant sur mon corps mais les baisers se changèrent rapidement en de multiples morsures. Je vais mourir. Non, je vous en supplie ! Pas comme ça ! Je me mis alors prier. Tout ce que j’avais appris alors que j’étais encore au catéchisme ressurgit. J’avais peur, si peur… Je sentais leurs lèvres sur ma peau, leurs longues canines tranchantes en moi. J’entendais le bruit de succion qu’ils faisaient tandis qu’ils buvaient mon sang puis tout d’un coup, ceci n’eut plus aucune importance. J’allais mourir et alors ?

Encore aujourd’hui, j’ai du mal à analyser les émotions qui s’emparèrent de moi cette nuit-là et pour être honnête, je n’ai nul envie d’y repenser mais pour comprendre ce que je suis, je dois être capable d’analyser ce qui s’est passé cette nuit-là même si cela ne me plait pas ou me fait peur…

Je devais être en train de flotter quelque part prête à partir pour le grand voyage au moment où je sentis de nouveau le goût du sang sur mes lèvres mais… Ce n’était pas le mien. Non ! Tout mais pas cela ! Pas cela. J’essayai de repousser cette main qui me donnait à boire mais j’étais attachée. Je voulais recracher ce sang maudit mais j’en subissais déjà la griserie, l’ivresse, le pouvoir. C’était trop tard. Le sang de Vampire entrait inexorablement en moi sans que je ne puisse faire le moindre geste pour l’empêcher. Je ne veux pas ! C’était trop tard. Mon cœur battait de plus en plus fort, de plus en plus vite. Le sang, mon sang commençait à se transformer. Mon corps aussi. Au moment où ils avaient commencé à me faire boire, c’était comme s’ils m’avaient brusquement rappelée sur terre mais là… Je planais de nouveau. Mon cœur martelait le peu de seconde qu’il me restait à vivre en tant qu’humaine… Puis ce fut soudain le silence. Presque aussitôt… De multiples bruits parvinrent à mes oreilles, me déchirant les tympans. Je sentais de multiples odeurs même si ma respiration avait cessé en même temps que les battements de mon cœur. Celle qui m’avait transformée sentait le chèvrefeuille. Plus de canines plantées dans ma peau. A quel moment s’étaient-elles retirées ? La main de celle qui venait de me transformer effleura ma joue. Je sentis ensuite de nouveau ses lèvres sur les miennes. La voix féminine reprit :

« Il faut te reposer maintenant Maîtresse. Nous allons te laisser. »

On me laissa le foulard sur les yeux. Je les entendis s’éloigner puis plus rien. Seules les bruits de la nuit m’entouraient et emplissaient mes oreilles. Sous le foulard, je sentis une larme perler de mes yeux. Elle atteignit bientôt mes lèvres. Elle avait un goût de sang. Un goût enivrant… Le goût du sang d’un Vampire. Sous le choc de ce que je compris alors, la larme devint vite un torrent. Je dus m’évanouir de nouveau.


Je me réveillai avec un horrible mal de tête. J’avais toujours ce satané foulard sur les yeux qui me prouvait que je n’avais pas rêvé. Je devais partir. Ce n’est pas possible… je ne peux pas être devenue cette… Cette chose ! Un Vampire ! Cela n’existe pas les Vampires ! Mais… le foulard… les cordes … En effet, j’étais toujours attachée à la table de pierre. Les cordes si rêches me sciaient toujours autant les poignets et les chevilles. L’air était frais sur ma peau nue mais je n’avais pas froid. Mais, j’avais faim et cette faim me faisait peur. J’avais envie de sang. Je sentais encore le goût de celui que j’avais eu dans la bouche. Me nourrir devint soudain mon seul objectif. Je passai ma langue sur mes canines. Je les effleurai à peine mais le sang coula tout de même, glissa sur ma langue puis dans ma gorge et aviva ma soif. Cela devint rapidement une obsession. Je devais me libérer pour trouver du sang. Peu importait ces cordes, ce bandeau, la faim était la plus importante. Peu importait ce que j’étais devenu. Seule la faim existait. J’essayai d’arracher mes mains de l’autel où j’avais été attachée. Les cordes cédèrent. J’étais libre ! J’arrachai aussitôt le bandeau que j’avais sur les yeux puis m’assit. Si j’avais un seul instant douté de ce que j’étais, ce que je vis alors confirma toutes mes certitudes. Il faisait nuit mais j’y voyais presque aussi parfaitement que le jour. L’obscurité disparaissait et laissait la place à la clarté mais ce n’était pas vraiment comme si c’était le jour… Les objets semblaient émettre leur propre lumière ce qui me permettait de les voir. Tout était si différent. Ma peau était devenue si blanche. Je regardais intensément mes poignets meurtris par les cordes qui commençaient déjà à cicatriser. J’arrachai les dernières cordes qui me retenaient attachée. J’allais pouvoir m’enfuir, échapper à tout cela. Mais comment pouvais-je fuir ? J’étais complètement nue. Les sensations que j’avais ressentie sous les baisers et les caresses de celle qui m’avait transformée me revinrent tout d’un coup en mémoire. Cela me donnait envie de vomir. J’avais aimé cela ! Les caresses, les baisers, le sang… Tout. Comment… Je me dégoûtais. Il fallait que je quitte cet endroit… Il fallait que je puisse oublier… Mais la faim était là elle aussi et j’aimais cette sensation. Elle voulait dire que j’étais vivante.

Je frissonnais mais je n’avais pas froid. Je n’aurais plus jamais froid. D’où peut bien provenir ce courant d’air? Je levai la tête. Tout le temps qu’avait duré la cérémonie, je ne m’étais pas rendue compte que nous étions dans une salle à ciel ouvert. C’était la pleine lune. Est-ce que je peux sauter aussi haut ?

Les Vampires possèdent bien une force hors du commun. J’avais réussi à arracher les cordes qui me retenaient prisonnière sans beaucoup d’effort après tout. Je pris de l’élan, sautai sur l’autel et me projetai de toutes mes forces vers le haut. Le résultat allait au-delà de mes espérances. Mais… J’étais trop haut et je risquais de me rompre le cou. Je réussis à atterrir sur mes jambes mais à quel prix. Je sentis mes os se rompre. Je me mis alors à me traîner par terre. Je voulais à tout prix m’éloigner de cet endroit. Une peur dont je ne réussissais pas à connaître l’origine s’était emparée de moi. Je devais partir. Mais si mon esprit ne semblait pas encore habitué à la transformation que je venais de subir, mon corps, lui, semblait avoir déjà tout assimilé ce que tout ceci lui avait apporté. Les os étaient en train de se ressouder à une vitesse incroyable. Je pus bientôt me remettre sur mes pieds et marcher. D’abord avec mille précautions puis, je pus enfin courir… Courir aussi vite que possible loin de ce lieu que je maudissais déjà.

Où pouvais-je bien aller ? J’avais faim. J’étais complètement nue dans un lieu qui m’était inconnu et que je n’arrivais pas à identifier. C’était un bois ou plutôt une forêt car il me fallut un grand moment pour arriver à une route. Je vis presque aussitôt des phares au loin. Je me couvris les yeux à cause de cette soudaine clarté. La lumière me faisait mal. Je vais enfin pouvoir me nourrir. Je tentai aussitôt d’éloigner cette pensée de mon esprit mais la soif de sang me tenaillait et elle était bien plus forte que ma peur.

J’étais au milieu de la route. La voiture s’arrêta. Heureusement pour le conducteur et malheureusement pour moi, il n’était pas seul. Ma soif n’était pas encore assez grande. Elle n’était pas encore au point de me faire perdre tout contrôle. Il n’avait donc rien à craindre.

Les portières s’ouvrirent et j’eus la désagréable surprise de reconnaître l’un de mes professeurs. Un sursaut de pudeur me prit enfin et je tentai de cacher mon corps mais… Il courut à moi en me demandant ce qui s’était passé. C’est à ce moment là qu’il se rendit compte de mon état.

« Oh mon Dieu ! » hoqueta-t-il.

Il retira sa veste et me la passa sur les épaules. Mes instincts de Vampire prirent alors le dessus. Je devais mentir. Je devais jouer. Personne ne devait savoir mon secret. Je fis semblant de tomber dans ses bras lui faisant croire que j’étais toujours sous le choc de ce qui m’était arrivé. Ce qui d’une certaine manière était vrai.

« On t’emmène à l’hôpital ! » Me dit-il.

Il m’allongea sur la banquette arrière de sa voiture et je fis semblant de m’endormir. Ceci me permis d’entendre toute la conversation qu’il eut avec sa compagne. Il croyait que j’avais été violée. Sa compagne lui dit qu’il fallait peut être mieux appeler les gendarmes.

Je commençais soudain à me sentir épuisée. Je remarquai que l’horizon avait pris une teinte plus orangée. Je compris d’où venait ma soudaine fatigue mais je n’eus pas la moindre peur de l’aube. Je m’endormis vraiment cette fois-ci.


« Chut, murmurait-elle. Tu n’auras plus mal, plus jamais. Nous ne te ferons aucun mal Maîtresse. Nous avons trop besoin de toi. Ne t’inquiète pas. Ce sera très vite passé.»

Elle m’embrassa langoureusement. Mon corps fut parcourut de multiples frissons de plaisir. Sa bouche quitta ma poitrine pour rejoindre mon cou et… Elle mordit.

« Laissez-moi ! Criai-je.

-Ahélya ! Réveille-toi ! »

Je me relevai brusquement la main sur le cou. J’étais vêtue d’une chemise de nuit d’hôpital. J’étais assis dans un lit immaculé. Ma mère, assise à mon chevet, me regardait inquiète. Je le regardai attentivement. Je n’avais jamais remarqué à quel point sa peau pouvait être ridée. Je compris soudain que c’était à cause de ma vision vampirique que je la voyais ainsi. Je regardai ensuite son cou. Les veines semblèrent gonfler sous la peau rosée. Je passai la langue sur mes canines. La vue de ces vaisseaux sanguins avait réveillée ma soif. Je ne m’étais pas encore nourrie depuis ma transformation. Il fallait que je l’oblige à s’approcher de moi. Je pourrais alors me jeter sur elle, la mordre et boire…Enfin.

« Maman… » Commençai-je.

La porte de la chambre s’ouvrit. Un médecin entra.

« On s’est réveillée à ce que je vois. » dit-il.

Je tournai la tête vers la fenêtre. J’avais eu envie de boire le sang de ma propre mère.

Je laissais alors échapper un léger cri de surprise. Le soleil était encore haut dans le ciel. La lumière entrait largement dans la pièce et je ne me consumais pas. Ceci allait à l’encontre de toutes les croyances qu’il y avait sur les Vampires. Je regardai le Soleil sans comprendre mais je dû vite en détourner les yeux. Sa lumière m’éblouissait tout de même et me faisait souffrir. Mes yeux la supportaient difficilement.

Toutes à mes découvertes, je ne faisais plus attention à ce qui se passait à côté de moi. Je me levai et m’approchai de la fenêtre. J’étais fascinée par ce que je voyais. Même si la lumière me faisait mal aux yeux, je regardai, j’observai. Tout était si différent mais en même tant si semblable à ce que je connaissais. J’appuyai ma main sur la fenêtre. Je sentais toutes les aspérités du verre. C’était incroyable ! J’étais perdue dans la contemplation de la ville au dessous de moi. Je voyais sans aucun problème ce qui se passait dans un salon aux fenêtres ouvertes. Un bruit assourdissant éclata soudain. Je me couvris les oreilles mais cela n’atténua en rien ce son. Je ressentais même les vibrations des murs de l’hôpital. C’était un avion qui passait au loin.

« Ahélya ? »

Je me retournai vers ma mère et le médecin. Ma mère se retira presque aussitôt et me laissa seule avec lui.

« Tu peux venir ? Je dois t’examiner. »

Je me rassis sur le lit. Il prit son stéthoscope. Je m’éloignai instinctivement. Mon cœur ne battait plus. Il allait s’en apercevoir. Il allait comprendre.

« N’ai pas peur, me dit-il.»

Il pourrait arrêter de me parler comme à une gamine de cinq ans ! Mais ses paroles ne m’avaient en rien rassurée. Je cherchai un moyen d’échapper à son examen. Je pouvais le tuer. C’était une mauvaise idée. La porte s’ouvrit de nouveau. Une femme entra.

« Excusez-moi mais je dois parler à Ahélya. »

Le médecin sortit en disant qu’il reviendrait plus tard. Je regardai cette femme, méfiante. Étrangement, je ne voulais pas qu’elle m’approche. Peut être parce qu’une femme était responsable de ma transformation. Mais elle n’était pas un Vampire, elle. Je le sentais. C’est juste qu’elle ne m’inspirait pas confiance.

« Tu peux m’expliquer ce qui t’es arrivée ? » demanda-t-elle en s’asseyant sur la chaise qu’occupait précédemment ma mère.

Elle recula subitement effrayée. Je ne sais pas ce que j’avais fait mais cela lui avait fait peur.

Je lui racontai rapidement ma soirée avec mon ex. J’arrangeai ensuite une histoire d’agression puis de cave et je me tus.

« Ils t’ont violée ? » Me questionna-t-elle avec mille précautions.

Je fus tentée de lui rire au nez. Je choisis la facilité. Je lui répondis que je ne me souvenais de rien. Je lui racontai que je m’étais finalement réveillée dans les bois et que j’avais réussi à rejoindre la route. Là un conducteur m’avait trouvée. Elle prenait un air incrédule à mon récit. J’avais conscience qu’elle ne me croyait pas.

L’interrogatoire se poursuivit. Quand je me retrouvai seule, je me remis à contempler ce qui m’entourait. Mais la conversation qui avait lieu derrière la porte de ma chambre d’hôpital attira bien vite mon attention.

« Elle est étrange, disait la femme qui venait de m’interroger.

- Que voulez-vous dire ? demanda le médecin.

- Une impression comme cela. Elle parait si tranquille… Trop tranquille. Et puis… Elle à une façon de vous regarder… C’est cela qui est étrange chez elle. Son regard. Il n’a pas l’air humain.

- J’ai bien peur de ne pas comprendre ce que vous voulez dire. »

La femme garde le silence.

« Elle est étrange c’est tout. » finit-elle par dire.

Je me désintéressai de la conversation. Elle ne m’avait pas vraiment percée à jour, c’était le principal. Je regardai par la fenêtre. Le soleil était en train de se coucher. Je sentis que mes forces étaient en train de revenir. La nuit arrivait. Je sortirais ce soir pour calmer ma faim mais aussi pour tester les pouvoirs que je semblais avoir acquis. J’avais envie de me battre. J’avais envie de faire du mal. Pourrai-je sortir cette nuit ? Voilà la seule question qui me préoccupait pour le moment. Ceux qui m’avaient fait cela pouvait bien attendre. La femme l’avait dit. J’avais maintenant l’éternité devant moi. Quelques nuits de plus ou de moins n’avaient aucune importance. J’avais le temps.

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Commentaires
J
Ah la la que de souvenirs ! Et dire que je lisais tes chapitres en cours !! (Notamment en Français et en Italien ^^ et peut-être parfois en maths aussi ...).<br /> <br /> Signé Jennifer alias la meilleure et la plus assidue de tes lectrices
Un capharnaüm dans ma tête
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